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Suède - Catarina Offe

Bailliage de Suède
Conseiller Culinaire

Un entretien exclusif pour illustrer sa grande expérience
« Apprenez le métier, sans raccourci ! »

Catarina Offe était membre de la Chaîne depuis près de 10 ans lorsqu’elle a été promue Conseiller Culinaire du Bailliage de Suède en 2011. Une nomination plus qu’évidente à la vue de sa vaste expérience dans le secteur de la restauration et de son engagement dans le développement de jeunes talents par le biais de participations aux concours.

Dans cet entretien exclusif accordé aux Actualités en ligne de la Chaîne, elle nous fait profiter de son expérience.

D’où vient votre passion pour la gastronomie ?
Travailler dans la restauration n’était pas mon objectif … je voulais devenir vétérinaire ! Ma mère savait bien préparer la cuisine classique, et elle s’intéressait aussi aux nouveaux plats et aux nouveaux produits, ce qui était inhabituel à l’époque. Je tenais la bonne cuisine pour acquise, car je ne connaissais rien d’autre.

Au lycée, après avoir réalisé que les sujets scientifiques étaient trop difficiles, j’ai dû abandonner mon rêve de travailler avec les animaux. Ma mère m’a suggéré le métier de chef dans la restauration, comme mon cousin. À l’issue de ma première formation pratique, j'ai juré de ne jamais retourner dans un établissement de restauration ! J’avais eu à découper en petits cubes 10 kilos de poitrine de porc, avec une peau bien épaisse, et je me suis fait réprimander parce que j'avais enlevé trop de gras.

Après avoir travaillé comme superviseur dans des hôpitaux, des écoles, des cuisines militaires et même dans une prison, étant jeune et pleine d’énergie, j’ai eu l’opportunité de passer dans le secteur privé en allant travailler chez Sodexo. J’ai pu y développer des compétences en gestion, devenant directrice régionale, puis directrice du secteur commercial, avant d’assumer les fonctions de directrice du marketing.

Enfin, un emploi très attendu de développeur de produits s'est présenté. Avec mon équipe de cinq créatifs, nous avons élaboré des concepts et organisé des festivals culinaires mettant en lumière la cuisine d’autres pays. Nous avons importé tout un éventail de produits alléchants.

En apprendre plus sur la cuisine tout en travaillant a été un véritable plaisir. Ma société parrainant l'Équipe culinaire suédoise, j'ai pu rencontrer les meilleurs chefs de Suède et les impliquer dans des projets et des événements divers.

Je suis désormais une véritable gastronome ! À la maison, mon mari, un chef allemand, prépare des plats plutôt classiques, tandis que je lui présente des recettes nouvelles.

Quels sont les plus grands développements gastronomiques dont vous avez été témoin ?
Le retour à la simplicité. Les produits de base exclusifs et différents, les nouvelles combinaisons de saveurs, les présentations créatives ne sont plus à mode. En Suède, nous avons toujours été intéressés par la cuisine internationale. Nous avons goûté aux saveurs étrangères, en conservant certaines, mais la tendance aujourd’hui est le retour aux sources.

La cuisine suédoise familiale et traditionnelle si longtemps oubliée a été remise au goût du jour. Notre Équipe culinaire suédoise a présenté nos produits sur la scène internationale et a gagné à plusieurs reprises !! La cuisine suédoise doit bien sûr être préparée avec des produits suédois. Certains ingrédients effectuent leur retour, avec au menu, le concept « de la tête à la queue ».

Quelles sont d’après vous les tendances ou les défis les plus significatifs auxquels la gastronomie fait face aujourd'hui ?
Continuer à utiliser des produits soigneusement sélectionnés. Pour appliquer le concept « de la tête à la queue », il est essentiel de se procurer de la viande de la meilleure qualité possible. N’acheter des animaux qu’auprès de fermiers ou de pays dont la qualité de l’élevage est avérée. N’utiliser que des poissons et des fruits de mer certifiés durables. Cela nécessite du courage !

La demande en aliments biologiques produits au niveau local est désormais plus forte que l’offre, même si nos meilleurs chefs soutiennent de petits producteurs, dont ils deviennent des clients réguliers.

Selon vous, que doivent faire les chefs d’aujourd’hui pour élever la gastronomie vers de nouveaux sommets ?
N’étant pas chef moi-même, même si j’admire profondément leur savoir-faire et leur créativité, il est difficile de savoir ce qu’ils nous préparent. Maintenir la gastronomie au niveau élevé auquel elle se situe aujourd’hui est un vrai challenge. La préparation de plats raffinés à partir de restes met au défi leur créativité. Les chefs semblent posséder une mine de produits secrets. Subitement, nous nous sommes mis à utiliser de l’huile de bouleau et d’autres produits dont nous ignorions l’existence.

Le dernier dîner du prix Nobel, lors duquel l’un de nos membres professionnels a officié en tant que conseiller gastronomique, a parfaitement illustré la grande tendance du moment. Aucun produit de luxe n’a été utilisé, à l’exception de notre « caviar » (des œufs de corégone). Pommes de terre, légumes racines et nouvelles variantes d’oignons, où même la membrane entre les rondelles d'oignons a été utilisée comme œuvre d'art pour l'entrée, désormais désignée « fantôme d’oignon ». Des feuilles de plantes aromatiques ont été utilisées dans le premier plat, suivies par leur tige dans le plat principal. Des goûts et des saveurs tels que fumée, cendre, suie et lichen, venu tout droit de la forêt, ont décoré le plat principal.

Aujourd’hui, beaucoup de grands chefs sont de bons chasseurs, et ils peuvent servir de la viande fraîche, en quantité limitée. Nos chefs sont d’importants éducateurs en termes de consommation. Nos meilleurs chefs innovent et les autres leur emboîtent le pas.

Quels conseils donneriez-vous à de jeunes chefs en herbe ?
Soyez humble et curieux. Apprenez le métier, sans raccourci ! Un excellent vin rouge ne fera pas de bonne sauce si on ne connaît pas les bases. Apprenez à suivre des recettes et à ne pas improviser. Les convives veulent retrouver les mêmes saveurs à chacune de leurs visites, sans avoir à attendre que Kalle ou Anna soit en cuisine. Apprenez les variantes, à réfléchir vite et à avoir une solution de rechange.

Dans les épreuves du concours des Jeunes Chefs Rôtisseurs, les questions posées aux jeunes chefs sur le matériel technique occupent toujours une place importante. Les techniques diverses ne résoudront jamais les défis culinaires. Les anciens chefs trouvent toujours des solutions dans des situations délicates. Les jeunes chefs sont bien sûr sur une pente ascendante dont ils ne doivent pas oublier le but. Un chef expérimenté, un peu las des jeunes chefs égocentriques qui peuplaient sa cuisine, a déclaré un jour : « Ils sont censés réaliser le rêve du convive et non le leur ». Si le convive est content, le rêve du chef deviendra réalité.

Enfin, il faut savoir s’entendre avec les autres. L’excès de confiance n’est pas la solution !


Nous adressons nos sincères remerciements à Margareta Henry, Chargée de Missions Honoraire, pour son aide lors de la préparation de la version anglaise de cet article.

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